TocCyclopédie ■ Époques

Après que des jeunes voyous aient été abattus par la police, des gangs s'unissent pour infliger des représailles sanglantes aux habitants du quartier. Après avoir abattu un de leurs chefs, un homme parvient à leur échapper et se réfugie dans un commissariat. Une nuit de siège commence...



Après avoir bricolé Dark star (1973) avec quelques amis, Carpenter va enfin réaliser Assaut, son premier film professionnel. Toutefois, il ne bénéficie que d'un budget très bas (100 000 dollars). Les comédiens principaux sont donc plutôt des habitués des seconds rôles : Austin Stoker (La bataille de la planète des singes (1973)...), Darwin Johnston (Eraserhead (1977) de David Lynch, Fog (1980) de John Carpenter...), Tony Burton (la série des Rocky avec Sylvester Stallone...). On remarque aussi la présence de Henry Brandon, vieil habitué des plateaux hollywoodiens : il a joué le rôle-titre dans le serial Drums of Fu Manchu (1940), ainsi que de nombreux rôles d'indiens dans les westerns des années 50 (notamment le chef qu'affronte John Wayne dans La prisonnière du désert (1956) de John Ford). Carpenter n'a jamais caché qu'Assaut s'inspire beaucoup de Rio Bravo (1959) de Howard Hawks, dans lequel un shérif interprété par John Wayne était assiégé avec quelques amis dans son bureau. On remarque d'ailleurs que le pseudonyme sous lequel Carpenter effectue le montage est John Chance, nom de ce shérif dans ce fameux western. Malgré un assez bon accueil critique, notamment en Europe, Assaut n'est pas encore un succès commercial.

Dès ce film, Carpenter traite déjà d'un sujet qui va toujours le fasciner : la violence urbaine. Si, dans les westerns, les grandes étendues de l'ouest étaient des lieux sauvages et sans loi, c'est aujourd'hui dans les centres-villes misérables et abandonnés par la société que prolifèrent la brutalité et l'arbitraire (on pense évidemment à New York 1997 (1981)...). La rue est alors l'enjeu d'une véritable guerre entre la société et des gangs de jeunes, insensibles à l'horreur de la violence et équipés d'armes à feu (on note que Carpenter annonce avec beaucoup de clairvoyance les gangs américains très violents des années 90). Ce réalisateur portera d'ailleurs toujours un regard inquiet sur les rapports entre les enfants et la violence (le prologue de Halloween (1978), Le village des damnés (1995), Los Angeles 2013 (1996)...).

Ici, le comportement des gangs fait beaucoup penser aux tribus indiennes des westerns : les chefs de bande mélangent leur sang pour sceller leur alliance ; leurs fusils automatiques équipés de silencieux frappent aussi discrètement et mortellement que les flèches des peaux-rouges ; ils se livrent à des rituels guerriers très codés (le drapeau et le sang déposé devant la porte du commissariat...) ; leurs déplacements sont silencieux et imperceptibles... Pratiquement muets, on ne voit que très rarement leurs visages, toujours inexpressifs et impassibles. Cette manière abstraite et inquiétante de les présenter annonce déjà le comportement de Michael Myers dans Halloween.

Enfin, la manière dont Carpenter traite les scènes d'action est particulièrement brutale et sanglante. Il s'inscrit ainsi dans la tradition d'un cinéma d'action et d'horreur qui tendait, sous l'influence, entre autres, de la guerre du Vietnam, à restituer la violence avec de plus en plus de réalisme : La nuit des morts-vivants (1968) de George Romero, le western La horde sauvage (1969) de Sam Peckinpah, La dernière maison sur la gauche (1972) de Wes Craven, Orange mécanique (1971) de Stanley Kubrick...

Une des composantes d'Assaut qui l'inscrit le plus fortement dans l'oeuvre de Carpenter est le traitement de ses personnages principaux. A l'issue de la première demi-heure, tous les "héros" potentiels, suivant les codes habituels du cinéma hollywoodien (policiers blancs), sont mis hors-jeu. Ce seront donc un prisonnier, un policier noir, une femme et un condamné à mort qui vont devoir résister aux assauts des guérilleros urbains. A force de solidarité, d'intégrité morale et de courage, ces personnages vont devenir de véritables héros. Carpenter joue ainsi habilement contre les clichés du cinéma classique américain et les préjugés du spectateur : on ne juge pas Napoléon Wilson sur son statut de condamné à mort, sur son passé (qu'on ne connaîtra d'ailleurs jamais vraiment) ou ses paroles (il est très peu bavard), mais sur ses actes accomplis dans le moment présent. Napoléon annonce par bien des aspects le personnage de Snake Plissken. Hors-la-loi, porteur d'un lourd passé, condamné par la société, sa méfiance envers les institutions collectives américaines (État, armée, gouvernement...) pourrait le faire passer pour un cynique : pourtant, il se caractérise aussi par une une admirable droiture morale et une très grande loyauté envers ses amis.

La réalisation est un modèle d'efficacité et de classe. S'il y a très peu de mouvement de caméra (le budget limité y est sans doute pour quelque chose), ce n'est guère gênant, car Carpenter fait le pari de la sobriété. Tout son art repose ici (comme dans ses meilleurs films) sur la précision et l'élégance de ses cadrages (superbe cinémascope, hélas parfois hideusement recadré pour certaines diffusions à la télévision) et sur un sens du découpage très impressionnant. Les deux fusillades sont d'incroyables travaux de montage : la première nous montre le commissariat se faire dévaster sans qu'on entende un seul bruit de détonation (à cause des silencieux qui équipent les armes de assaillants) ; la seconde brille surtout par son impressionnante brutalité et sa sécheresse époustouflante. On y apprécie déjà un thème électronique sobre et puissant, composé par Carpenter lui-même, qui annonce ses plus belles réussites en matière de musique de film (Halloween, New York 1997...). Sa maîtrise du découpage et de l'espace lui permettent aussi d'inscrire avec beaucoup de sûreté l'action et le danger dans les locaux exigus du commissariat, comme il le fera aussi avec la maison d'Halloween, la station service de Body bags (1993) ou le motel de Vampires (1998).

On apprécie encore la rigueur de la narration. Partant d'une situation d'une simplicité biblique, Carpenter orchestre une montée de la tension imparable, ponctuée par trois paroxysmes très forts (les deux fusillades, le final), et rythmée par le recul de plus en plus inévitable des personnages principaux. Leur situation est d'ailleurs dès le début du siège potentiellement intenable. Ne disposant que de très peu de moyens humains et matériels, ils sont, a priori, condamnés à être vaincus à très brève échéance. Leurs actions ne leur servent pas à vaincre le péril, mais uniquement à gagner du temps, en espérant que "la cavalerie" va arriver pour les sauver.

Assaut apparaît aujourd'hui comme le premier film véritablement personnel de Carpenter, et aussi comme une de ses réussites les plus irréprochables.

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Du Grand Carpenter !
■ Vonv 28/02/2004
Ouaip y a pas à dire, il maîtrise le gars Carpenter ! Autant perso, Ghost of Mars restera une bouse, autant Assaut, même à la deuxième vision, est un vrai régal de, comme dit Fab, western urbain, mélange d'action, de tension et d'humour !

Rien est à jeter : zik, image, acteurs !!! A voir !
Chef d'oeuvre...
■ Fab 22/08/2003
Carpenter aime le western... urbain ou futuriste de préférence... Ici, c'est urbain : l'histoire est simplissime et on est vite pris dedans ! A voir absolument !!

Petit reproche : l'édition DVD française est pourri... (image nul et une scène à mystérieusement disparue...) :(

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Merci à Monsieur Sandy Petersen !
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