A la mort de Mr. Wing, sa petite boutique d'antiquités chinoises est démolie par un entrepreneur. Gizmo parvient à s'échapper, mais il est aussitôt capturé par un laboratoire spécialisé dans la génétique, situé au coeur d'un gigantesque building. Ce qui doit arriver arrive, et la tour est rapidement envahie par des gremlins malfaisants...
Gremlins (1984), à la grande surprise de Warner, son studio de production,obtient un énorme succès international. Joe Dante devient alors un réalisateurrecherché, dont l'image est définitivement associé à son producteur Steven Spielberg.Avec Les banlieusards (1989), il tourne une comédie horrifique et paranoïaqueinterprétée par Tom Hanks : le film ne sera distribué en France qu'en vidéo. Warner,de son côté, souhaite à tout prix donner une suite à Gremlins. Ils finissentpar accorder carte blanche à Dante, et lui fournisse un très gros budget de 50 millionsde dollars. Dante saute sur l'opportunité et souhaite se venger des limitations qu'ilavait du subir pour le premier volet, avec notamment la présence envahissante de Gizmo,qui était en fait une idée de Spielberg. Il commande un scénario à Terry Jones, membrede la célèbre troupe britannique des Monty Python : le résultat enthousiasmeDante, mais est refusé par Warner qui le trouve trop irrespectueux envers sa précieuselicence Gremlins. Ce sera finalement Charles Haas qui se chargera du script.Chris Walas, responsable des effets spéciaux du premier volet, est remplacé par RickBaker (La guerre des étoiles (1977), Le loup-garou de Londres (1981) deJohn Landis...). Les deux rôles principaux sont toujours tenus par Zach Galligan etPhoebe Cates, tandis qu'on retrouve des visages typiques des films de Dante, comme DickMiller (qui, jusqu'à maintenant, a joué dans tous les films de ce réalisateur) ouRobert Picardo (Hurlements (1981), Le voyage intérieur...).
L'argument est, on le voit, assez maigre. Expédié en une petite demi-heure, la mise enplace de l'invasion de la tour par les Gremlins ne sert en fait que de prétexte à lancerplus d'une heure de délires ininterrompus sur l'écran. Dès le générique, Dante rendhommage aux cartoons de la Warner, avec un prologue parodiant la célèbre ouverture des"Looney Tunes", réalisé par Chuck Jones en personne. A partir du momentoù les petits monstres sont lâchés, le film devient en fait un long dessin animélive, dans la tradition des meilleurs oeuvres de la MGM ou de la Warner. Gremlins 2 relèvealors plus du collage, ou du film de montage, que d'une oeuvre cinématographiqueclassique. Les vrais stars sont désormais les ignobles gremlins. Le gentil Gizmo, retenuprisonnier, est neutralisé pendant la plus grande partie du métrage. Il ne retrouve unrôle important dans l'histoire qu'à partir du moment où il se décide à devenir un peuplus "méchant", notamment grâce à l'influence de Rambo II (1985),qu'il apprécie énormément !
L'humour noir règne donc en maître. En écho à la fameuse séquence du mixer de Gremlins,les lutins maléfiques sont soumis à des traitements d'une rare brutalité : un gremlinest transformé en bouillie verdâtre par un broyeur à papier, d'autres sontécrabouillés par la chute d'une cage d'ascenseur, ou fondent lorsqu'ils sontélectrocutés... On est surpris que la commission de classification américaine, il estvrai moins sévère avec les productions des Majors qu'avec les petits filmsindépendants, ait laissé passer Gremlins 2 en seulement PG-13 (autorisé àtous publics, avec juste un avertissement). Le film baigne dans une méchanceté assezréjouissante. Ainsi, le gremlins intelligent (un mutant, donc) en abat un autre enproclamant : "ce n'est pas civilisé, mais c'est drôle !", résumant ainsitoute la philosophie destructrice de Gremlins 2. Dante se montre aussi fortcritique envers la civilisation urbaine de son époque, et aussi envers le monde dutravail, son cynisme et sa manière de favoriser l'arrivisme plutôt que la compétence oule talent.
Les gremlins vont jusqu'à détruire le film lui-même, dans un passage d'anthologie, aucours duquel les lutins, dans la cabine de projection, profite d'une rupture de lapellicule projetée pour lui substituer un documentaire naturiste ! Il faudral'intervention du catcheur Hulk Hoogan pour les ramener à l'ordre et reprendre le coursnormal de Gremlins 2 ! On retrouve donc l'humour délirant d'un Tex Avery, dansles cartoons duquel il arrivait fréquemment qu'un personnage sorte du cadre, ou s'adresseaux spectateurs dans la salle... qui lui répondent ! Bien entendu, les références entout genre au cinéma populaire fusent de partout. Le grand Christopher Lee incarne ainsiun savant fou : sa première apparition est cadrée en "plan rapprochépoitrine", rappelant sa célèbrissime arrivée dans Le cauchemar de Dracula(1958) de Terence Fisher, tandis qu'il s'avance au milieu de délirants éclairages à laMario Bava, réalisateur avec lequel il avait tourné plusieurs fois (Le corps et lefouet (1963) par exemple). Plus loin, il se promène avec, dans les bras, une cosseéchappée de L'invasion des profanateurs de sépultures (1956). Tous les genresy passent : la comédie musicale, le film de guerre, le film d'épouvante... Sortis denulle part, ces créatures font preuve d'une culture cinématographique assezébouriffante et saturent l'écran de gags s'enchaînant à sur un tempo endiablé.Néanmoins, Gremlins 2 n'est jamais pédant : les références sont toujoursdrôles, et Dante s'amuse, comme ses petits monstres, en rendant néanmoins hommage à sessources.
Plus fou, plus drôle, plus méchant et aussi plus grivois que Gremlins, Gremlins2 est donc une vraie réussite, proposant un résultat moins inégal que sonprédécesseur. Plus qu'un film, ce long cartoon est avant tout une fête pour lesamateurs de cinéphilie populaire et d'humour noir. Pourtant, il recevra un accueilcritique assez mitigé et ne connaîtra pas le succès espéré en salles aux États-Unis.Dante se consacrera ensuite à la réalisation de Panic à Florida Beach (1993),chronique nostalgique du cinéma de série B des années 1950, inspirée par lepersonnage du réalisateur William Castle (La nuit de tous les mystères(1959)...). Vient ensuite une série de téléfilms, dont The second civil war(1994), avant qu'il ne renoue avec Spielberg et réalise pour son compte Smallsoldiers (1998), dans lequel des jouets s'affrontent dans une guerre sans merci.
Bibliographie consultée :