Deux prisonniers évadés rejoignent des yakusas au milieu d'une forêt. Mais leur rencontre dégénère et des gangster sont tués. Sous l'influence maléfique de l'endroit, ces morts reviennent à la vie et un combat homérique entre les forces du mal et du bien va commencer...
Versus, l'ultime guerrier est le premier long métrage de Ryuhei Kitamura, un jeune réalisateur japonais qui s'était auparavant illustré dans la réalisation de courts et de moyens métrages. Le film a été tourné avec un budget modeste, essentiellement en extérieur. Les comédiens sont avant tout des amateurs ou des acteurs peu connus. Projeté au festival du cinéma fantastique de Gerardmer début 2001, il a reçu un accueil enthousiaste, notamment de la part du magazine Mad Movies. Bénéficiant de l'engouement actuel pour le cinéma d'action asiatique, il acquière une excellente réputation. Pourtant, il faudra attendre plus d'un an pour qu'il ait le droit à une modeste sortie en salles en France.
L'argument du récit, contrairement à ce qu'on pourrait croire, va s'avérer relativement compliqué. Tel Ash dans L'armée des ténèbres (1993) de Sam Raimi ou Max Rockatansky dans Mad Max, au-delà du dôme du tonnerre (1985), le gangster immoral KSC2-303 va se retrouver, malgré lui, chargé de la défense de l'humanité contre les forces des ténèbres. Il devient alors l'incarnation d'une prophétie très ancienne, et Versus, l'ultime guerrier glisse progressivement vers un récit mythologique et symbolique, évoquant très clairement (notamment dans son duel final) Highlander (1986) de Russell Mulcahy. A travers un cycle de réincarnations infini, le bien et le mal sont voués à s'affronter indéfiniment à travers l'espace et le temps.
Pourtant, la volonté de développer ce récit ambitieux va gravement alourdir la narration du film, qui, au début, se passait très bien d'un scénario. Les personnages se mettent à faire des discours confus et à échanger des bavardages ennuyeux, tandis que les péripéties se compliquent de manière parfois vaine (les histoires tournant autour du personnage de la jeune fille kidnappée...). Fatalement, Versus, l'ultime guerrier souffre d'un grave problème de rythme interne, et, entre deux bagarres mémorables ou deux scènes de comédie hilarantes, il faut subir quelques assommantes discussions, tandis que les dernières confrontations sombrent dans une lourde grandiloquence. Tout cela est d'autant plus regrettable que l'histoire développée se révèle somme toute assez peu intéressante. Regrettons aussi que certains personnages humoristiques (les policiers...) soient cruellement sous-exploités.
La réalisation est plus ou moins habile selon les séquences. Les comédiens ne sont pas toujours crédibles et certains coups sont portés assez maladroitement, tandis que la lisibilité du montage peut poser problème : on est tout de même assez loin de la rigueur et de la clarté d'un John Woo (A toute épreuve (1992)...), d'un Sam Raimi (Evil dead (1982)...) ou d'un Peter Jackson (Braindead...). La réalisation abuse notamment d'effets à la mode (caméra tremblante, accélérés, montage , obturateur rapide pour donner une impression de rythme saccadé...) et d'élans virtuoses un peu gratuits (travellings circulaire à la steadicam, combinaisons zoom/travellling...). Cela se fait au dépend de la lisibilité des séquences et, donc, du plaisir du spectateur. Il faut toutefois se rappeler que les comédiens ne sont guère des champions d'arts martiaux, et que le budget du métrage est modeste : globalement, les scènes d'action finissent toujours par entraîner l'adhésion grâce à leur énergie et leur entrain.
Entre certaines séquences d'action spectaculaires et des passages comiques sympathiques d'une part, et des bavardages soporifiques, une réalisation parfois brouillonne et un rythme d'ensemble chaotique d'autre part, ce film séduit autant qu'il irrite, divertit à certains moment, ennuie à d'autres. Versus, l'ultime guerrier est un film plutôt réussi, mais qui souffre avant tout de son caractère inégal.
Bibliographie consultée
- Mad Movies numéro 130, mars 2001
- L'écran fantastique numéro 218, février 2002