Des fuyards se réfugient dans une ferme alors que la campagne est envahie par des personnages étranges, qui assassinent et dévorent tout ceux qu'ils rencontrent...
La nuit des morts-vivants est le premier long métrage de George Romero. Ce sera une révolution cinématographique fondamentale aux Etats-unis. Dès le début des années 1960, le cinéma fantastique reflète la crise de la société américaine, qui doit faire face aux problèmes de ségrégation ou à la peur de l'atome. Des films de science-fiction invitent le pays à prendre conscience de ses problèmes internes : Le dernier rivage (1959) de Stanley Kramer, Le monde, la chair et le diable (1959) de Ranald MacDougall ou La planète des singes (1968)... montrent une Amérique qui perd confiance en ses valeurs traditionnelles, notamment en décrivant un monde ravagé par des catastrophes nucléaires. Parallèlement, Psychose (1960) de Hitchcock, les productions Hammer et les petites bandes gore de Herschell Gordon Lewis (2000 maniacs (1964)...) ont fait monté d'un cran la violence dans le cinéma d'épouvante. Enfin, il ne faut pas oublier que les U.S.A. reçoivent des images horribles de la guerre du Vietnam, grâce à des photographes comme Larry Burrows. C'est en plein dans ce contexte troublé qu'apparaît cette petite production indépendante, La nuit des morts-vivants...
La nuit des morts-vivants reste toujours aussi efficace grâce à la crudité de son style et à son réalisme documentaire, non dépourvu, pourtant, de touches expressionnistes. Cela permet de créer une ambiance constamment morbide et pesante. Romero avoua avoir été influencé par un petit film, Carnival of souls (1962). Cette référence est particulièrement évidente dans les premières séquences (la poursuite dans le cimetière...). Pourtant, on pense plutôt à un western horrifique pour les scènes de siège très efficaces qui arrivent ensuite. Les morts-vivants se détachent de façon lugubres dans la nuit de façon vraiment impressionnante. Les scènes de meurtre et les actes de cannibalismes sont oppressants, répugnants.
La nuit des morts-vivants a aussi une charge politique très importante. Romero décrit une société en pleine déliquescence, dans laquelle les personnages sont perdus et isolé au milieu d'une Amérique en déroute. Le retour des morts à la vie est décrit comme la conséquence d'une catastrophe écologique. L'ordre social et les valeurs de la civilisation s'effondrent. Des zombies tuent des membres de leur propre famille, ou se livrent à des actes de cannibalisme. Quant aux rescapés, ils compromettent leurs chances de survie en se disputant stupidement pour des enjeux de pouvoir ou à cause de préjugés racistes et sociaux. A la fin du film, l'ordre paraît sur le point d'être rétabli par l'armée et les miliciens. Mais, il s'agit d'un ordre brutal et stupide. Les dernières scènes de chasses aux zombies sont inoubliables par leur violence et leur cruauté. Le générique de fin, qui nous montre des cadavres tirés à l'aide de crochets de bouchers vers un immense bûcher, comme pour une orgie d'extermination, est inoubliable.
Pessimiste et terrifiant, La nuit des morts vivants est un immense classique. Il va lancer toute la vague des films de zombies des années 1970-80. Et surtout, il a repoussé les tabous qui pesaient sur la représentation de la violence dans le cinéma, permettant enfin au spectateur de regarder la mort en face. Les petites longueurs et l'interprétation parfois un peu maladroite soulignent encore l'étrangeté dérangeante de ce film plus qu'elles ne gênent le spectateur. Romero donnera deux suites à La nuit des morts-vivants: Zombie (1978) et Le jour des morts-vivants (1985).