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Les principes du jeu de rôle
Par Fred

Dans le cadre de cette analyse, et afin de permettre de saisir pleinement les situations observées il me paraît primordial de procéder à une présentation des principes de jeu qui fondent le jeu de rôle. Vous trouverez ci-dessous une description synthétique de ce qu'est un jeu de rôle ainsi que des explications plus détaillées sur les différentes particularités de ce type de jeux.

Définition
Le jeu de rôle est un jeu de société dans lequel les joueurs incarnent des personnages qui vivent une aventure. Une autre personne, le meneur de jeu, arbitre et anime la partie. Le jeu de rôle est avant tout basé sur le dialogue entre le meneur de jeu et les joueurs. Le meneur de jeu décrit une situation à ses joueurs et ceux ci font réagir leurs personnages en fonction de cette situation. Il n'y a pas de gagnants ou de perdants au sens propre du terme dans un jeu de rôle. En effet le but pour les joueurs est de réussir à résoudre l'énigme proposé par le meneur de jeu, celui ci ayant pour but de mettre en scène (du mieux que possible) le déroulement de l'aventure.

Le jeu de rôle est avant tout un jeu de société. En effet il n'est pas possible d'y jouer seul, il faut être au minimum deux. Le nombre idéal de participants étant situé entre 4 et 8. Si le jeu de rôle ne peut se jouer qu'au moins à deux c'est parce qu'il existe deux types d'acteurs dans un jeu de rôle :
Le(s) joueur(s) : chaque joueur incarne un personnage. Ce personnage est défini suivant des caractéristiques telles que sa force, son intelligence etc. L'ensemble de ces caractéristiques est notée sur une feuille de personnage et permet de définir l'individualité de celui ci. (Voir annexes 1, 2 et 3 pour des exemples de feuilles de personnages).

Le Meneur de Jeu (MJ) : c'est à la fois l'arbitre, l'allié et l'opposant des autres joueurs. Son but est de proposer et de mettre en scène une aventure intéressante. Il incarne tous les personnages que seront amenés à rencontrer les joueurs, il fournit les descriptions des lieux dans lesquels les joueurs évoluent, règle les conflits .
Le jeu de rôle est avant tout un jeu de dialogue. Ce sont les interactions entre le(s) joueur(s) et le meneur de jeu qui permettent de faire évoluer les situations. Une exemple de partie de jeu de rôle permettra de clarifier le rôle de chacun des acteurs.

Exemple d'une partie de jeu de rôle (voir annexe 4 pour un seconde exemple) :

- Jean incarne le personnage de John Wesson, un détective privé chargé d' enquêter sur le vol d'un bijou.
- François est le meneur de jeu. Il n'incarne pas de personnage en particulier.

Situation initiale :Le personnage de Jean (John Wesson) sait qu'il n'existe qu'une personne dans la ville capable de revendre le bijou qu'il recherche. Il indique donc au meneur de jeu (François) qu'il se rend chez cette personne. (Le dialogue qui suit est typique d'une situation de jeu de rôle.)
Jean (alias John Wesson) : Je me rends chez Laurent Wilson le receleur dont mes contacts dans la pègre m'ont parlé. François (Meneur de Jeu) : Ok tu t'y rends de quelle façon ? Jean : Euh . c'est loin de chez moi ? François : Assez oui. Environ une heure à pied ou vingt minutes en voiture. Jean : Je ne préfère pas prendre ma voiture pour me rendre chez un malfrat. J'appelle un taxi. François : Très bien, une demi-heure plus tard tu te retrouves devant la porte de l'immeuble de Wilson. Il y a un homme dans le hall, il te semble l' avoir déjà vu quelque part. Fais moi un jet de " connaissance de la rue".

Ici intervient la notion de jet de dé qui se révèle très importante en jeu de rôle. Dans le cas de l'exemple imaginons que Jean / John Wesson possède un score de 2 dés en " connaissance de la rue". Le meneur de jeu va affecter une certaine difficulté à une action, ici se souvenir de l'endroit où il a vu cet homme. François considère qu'il ne sera pas difficile pour John Wesson, privé habitué des bas fonds de reconnaître le bras droit du dénommé Wilson. Il prévient donc Jean qu'il doit faire un score de plus de 5 avec ces deux dés (ce qui n'est pas très difficile, si François avait estimé que cette action devait être très difficile il aurait demandé à Jean de faire un score supérieur à 10 avec deux dés).

Jean (qui jette deux dés et additionne le résultat) : j'ai fait 9. François : Tu reconnais l'homme, d'après tes souvenirs ce doit être le principal collaborateur de Wilson. On le dit impulsif et dangereux. Jean : Je me redresse pour lui montrer qu'il ne m'impressionne pas. Je rentre dans le hall. Je m'approche de lui en le regardant droit dans les yeux. Et je lui dis que je veux voir Wilson. François (prenant une voix rauque) : Qu'est ce que tu lui veux à Wilson ? T' es qui d'abord ? La suite de cette partie dépendra de la façon dont Jean / John va répondre à cet interlocuteur.

Cet exemple très classique de jeu de rôle permet de mettre en valeur les spécificités des deux acteurs : le joueur et le meneur de jeu. Dans cet exemple le joueur est seul (Jean), il est à noter que dans la grande majorité des parties de jeu de rôle les joueurs sont plus nombreux (entre 4 et 8). Il est en effet plus intéressant de " travailler en équipe". Au travers de cet exemple on voit que le meneur de jeu a de multiples fonctions. Il doit décrire les lieux que les personnages visitent. Faire parler les personnages qui ne sont pas joués par des joueurs. Arbitrer la partie etc. Si on considère l'évolution d'une partie de jeu de rôle comme celle d'un roman, où le joueur est le personnage principal et le meneur de jeu le narrateur, il est alors possible d'en définir le dispositif actantiel comme suit :

Destinateur ? Objet ? Destinataire
Adjuvant ? Sujet ? Opposant

Objet (ce qui subit ou qui résulte de l'action) : l'énigme proposé par le meneur de jeu.
Sujet (celui qui fait l'action) : le personnage incarné par le joueur.

Destinateur (ce qui déclenche l'action) : la présentation de l'énigme par le meneur de jeu (une intrigue mal introduite risque de ne pas intéresser les joueurs).

Destinataire (celui qui bénéficie de l'action) : le joueur, qui est récompensé pour avoir su résoudre l'énigme proposée par le meneur de jeu.

Adjuvant (celui qui aide l'action) : le meneur de jeu au travers des aides qu'il apporte aux joueurs.

Opposant (celui qui bloque l'action) : le meneur de jeu au travers des embûches qu'il a choisi de placer sur la route des joueurs.

Ce schéma permet de rendre compte de l'ambivalence du meneur de jeu qui est, à la fois l'opposant et l'adjuvant des joueurs.

Les principes du jeu de rôle ayant été énoncés il nous faut maintenant nous poser la question suivante : quelles sont les particularités qui permettent de différencier un jeu de rôle d'un autre ? Ces particularités sont au nombre de deux : d'une part le système de règles et d'autre part l'univers de jeu. Le système de règles spécifie la façon dont sont gérées les actions, par quelles caractéristiques sont définis les personnages etc. L'univers de jeu, que l'on appelle également background (arrière-plan en anglais), définit l'histoire, la géographie, la politique du monde dans lequel les personnages évoluent. Afin de clarifier ces différences prenons l'exemple de deux jeux de rôles : StarWars et L'appel de Cthulhu. Star Wars (La Guerre des Étoiles) est un jeu dans lequel les joueurs incarnent des membres de la rébellion. L'univers de jeu n'est pas difficile à définir, il suffit d'avoir vu les films de George Lucas (le jeu est basé sur la première trilogie) pour être en mesure de l'appréhender. Le système de règles est le suivant : lorsqu'un joueur tente de réussir une action, le meneur de jeu attribue une difficulté à celle-ci en terme de score minimum à atteindre avec le nombre de dés que le joueur possède dans la caractéristique concernée. Prenons l'exemple du Joueur Professionnel (on se reportera aux annexes 1 et 2). Jean, qui incarne cette fois le personnage du joueur professionnel, décide de tenter de se dissimuler aux regards d'une sentinelle. Pour se faire il devra réussir un jet de dissimulation - discrétion (catégorie perception). Il possède un score de 4 dés en dissimulation - discrétion. Le meneur de jeu décide que cette action est risquée et lui attribue un seuil de réussite de 15. Pour réussir à passer inaperçu Jean devra donc faire 15 ou plus avec 4 dés à 6 faces. L'appel de Cthulhu est un jeu d'enquêtes et d'explorations dans le monde des années 20, sur fond de menaces d'outre-espace et de fantastique, d'après l'ouvre de H.P. Lovecraft. L'univers de jeu est celui de l'Amérique de la prohibition au sein de laquelle l'occultisme est fortement développé. Le système de jeu est fort simple (voir annexe 3 pour la fiche de personnage). Soit l'exemple suivant : le personnage de Harvey Walters souhaite réussir à faire décoller un avion, pour cela il devra réussir un jet inférieur ou égal à 60 avec un dé 100 (Il possède un score de 60% en " Piloter un avion").

Un jeu de rôle est donc défini par deux variables, ses règles et son univers. On définira les règles comme la dimension technique du jeu et l' univers comme sa dimension culturelle. Nous verrons que ces deux dimensions permettent de structurer le langage des rôlistes.

Le langage des joueurs de jeux de rôles

Toute sous-culture développe un vocabulaire spécialisé qui lui est propre, qui peut désorienter et tromper les personnes extérieures, et le monde du jeu de rôle n'échappe pas à cette règle. Toutefois il ne serait pas judicieux de rapprocher ce langage de celui que peut engendrer la pratique d'un sport par exemple. Dans le cas d'un sport, il est aujourd'hui possible d'acquérir le vocabulaire technique qui s'y rapporte sans pour autant le pratiquer activement. Il suffit pour cela de se procurer des ouvrages traitant de ce sujet. Pour le jeu de rôle cet apprentissage est plus complexe. Il n'existe aucun ouvrage traitant du sujet et la transmission de ce langage ne se fait que de rôliste à rôliste. C'est pourquoi la maîtrise du dialecte parlé par les rôlistes peut être, à mon sens, révélateur du niveau de l'intégration d'un individu dans le groupe. Le langage des rôlistes peut être perçu comme un " patois ". Les structures grammaticales restent les mêmes qu'en français mais le vocabulaire, lui, est particulier. On observera également que la pratique de ce patois engendre la création d'expressions figées et de mots composés qui ne répondent à aucunes règle de syntaxe. Afin de comprendre certaines de ces expressions ou certains des mots qui seront utilisés dans le reste de ce dossier il est important de garder à l'esprit que l'origine des jeux de rôles est américaine. Aussi on trouve (tout au long des exemples) des expressions et des termes anglais (francisés ou non) ainsi que des éléments de la culture anglo-saxonne. Cette omniprésence de l'anglais a conduit au développement d'un patois qui mélange allègrement langue anglaise et langue française. Mais le mélange de deux langues n'est pas la seule caractéristique de ce patois. On distinguera trois dimensions qui permettent de le structurer. La première dimension (ou premier axe) est technique, la seconde (deuxième axe) est culturelle et la troisième, qui transcende les deux autres, concourt à la création d'un univers de référence.

On peut représenter l'acquisition de ce patois (qui reflète la socialisation d'un membre dans le groupe) par le graphique ci-dessous :



L'évolution d'un individu par rapport à l'axe 1 (langage technique) reflète sa connaissance des principes du jeu de rôle ainsi que celle des différents systèmes de règles.

L'évolution d'un individu par rapport à l'axe 2 (connaissance de l'univers du jeu) reflète la maîtrise que celui-ci a du background d'un jeu. Sur le graphique sont représentés deux types de flèches : les plus fines représentent l'univers d'un jeu en particulier alors que les plus épaisses représentent une famille d'univers (exemple : AD&D, Rêve de dragon et JRTM possèdent tous les trois des univers de jeu distincts mais ils font tous partie d'une même famille d'univers, à savoir le médiéval fantastique).

L'évolution d'un individu par rapport à l'axe 3 (création d'un univers de référence) est la résultante d'une évolution sur les deux autres axes. La création d'un univers de référence est la dernière étape de l'apprentissage du patois des rôlistes. L'évolution sur cet axe implique une progression corrélative sur les deux autres.

La dimension technique du patois rôliste
La dimension technique du patois rôliste regroupe les termes ayant trait aux principes de base du jeu de rôle ainsi que ceux qui font référence à des systèmes de règles particuliers. On classera ces termes en trois catégories.

La première regroupe les termes et expressions servant à exprimer des concepts spécifiques aux jeux de rôles. On trouvera dans cette catégorie des locutions telles que : - Faire un jet de (nom de la compétence) On exprime par cette expression l'idée suivante : faire un jet de dé et le comparer au score que l'on possède dans cette compétence pour savoir si l'action tentée est réussie. Le type de dé est déterminé par les règles du jeu. - Faire un critique Dans de nombreux jeux de rôles le fait de réussir particulièrement bien un jet de dé est appelé critique. Avoir la chance de faire un critique peut avoir des conséquences radicales sur le reste de la partie. On considère le critique comme un " super jet ". Autour d'une table de jeu il est fréquent que la réussite d'un jet de façon critique soit accompagnée de cris de joies et de gestes de soulagement. Note : les critiques fonctionnent dans les deux sens. Ils peuvent être positifs comme négatifs quoi qu'il en soit ils impliquent toujours des résolutions extrêmes. La seconde catégorie regroupe les abréviations courantes. Dans l'univers du jeu de rôle les abréviations sont très répandues. On peut considérer qu'elles font partie intégrante du langage puisque les joueurs ne prennent même plus le temps de les traduire lorsqu'ils s'expriment oralement. Certaines notions sont communes à la grande majorité des jeux, ainsi on retrouvera fréquemment des abréviations du type : D6, D10, D100 : pour dé à 6 faces, dé à 10 faces ... FOR, DEX, POU : pour Force, Dextérité, Pouvoir. Dans le cas de FOR, DEX et POU il est intéressant de constater que même les éditeurs de jeux de rôles ne prennent plus la peine d'écrire en toutes lettres les mots que ces abréviations représentent. On retrouve donc sur les fiches de personnages des abréviations que seuls les rôlistes sont en mesure de comprendre.(Voir annexe 3) La troisième catégorie regroupe les locutions techniques qui renvoient à des principes spécifiques à un jeu ou à un système de règle. On trouvera, par exemple, dans cette catégorie l'abréviation SAN qui désigne la caractéristique de santé mentale dans le jeu de rôle L'appel de Cthulhu ou tout autre terme technique inventé par les auteurs d'un jeu en particulier. Ces locutions sont les plus difficiles à acquérir puisque pour toutes les connaître il faudrait connaître tous les systèmes de règles.

La constitution d'un univers de référence

La première locution qu'il est intéressant d'étudier dans le cadre de la constitution d'un univers de référence commun est celle de " rôliste". Par ce terme les joueurs de jeux de rôles se définissent et se reconnaissent. Ce vocable générique, qui désigne le groupe, a pour les joueurs de jeux de rôles un aspect positif. Il définit l'autre comme semblable, il l'intègre dans une catégorie de pairs.

Le fait de dire de quelqu'un qu'il " est rôliste" s'avère (dans la bouche d'un autre rôliste) être un compliment. Cette expression pourrait être synonyme de " il me comprend" ou de " nous sommes semblables". La constitution d'un univers référentiel commun est l'étape ultime d' intégration dans le groupe des rôlistes. Un individu qui adhère à ce référentiel est en mesure de comprendre la plus grande part des rôlistes, il aura pour cela assimilé les concepts régissant les jeux de rôles (langage technique des règles) et acquis une large connaissance des univers de jeux (vocabulaire). La formation d'un univers de référence est donc assujettie à la maîtrise des deux premières dimensions du patois rôliste (technique et culturelle). On constate cependant que la troisième dimension (référentielle) englobe et transcende les deux autres. En effet un individu peut apprendre à maîtriser les dimensions techniques et culturelles de ce patois de façon autonome. Il va acquérir cette maîtrise de la langue au contact des autres rôlistes mais cet apprentissage n'est pas un apprentissage de groupe. Il relève de l'accomplissement de soi de manière individuelle. A l'inverse, le développement d'un univers de référence est, par essence, un phénomène collectif. Il ne saurait exister sans la présence du groupe, il doit donc être considéré comme un fait social. Le jeu de rôle est avant tout basé sur l'interaction entre les joueurs de la même façon la construction d' un univers de référence est lui aussi le fruit des interactions entre les différents joueurs. Cependant cette interaction se situe à la fois à l' intérieur et à l'extérieur de l'acidité. L'exemple le plus flagrant de la portée collective de ce référentiel est la création d'un humour rôliste. Cette forme d'humour s'appuie sur les trois dimensions du langage que nous avons étudiées. On rencontrera des expressions humoristiques telles que :

- Backstaber un beholder. Cette plaisanterie, très connue des rôlistes, est proprement incompréhensible pour les personnes extérieures au groupe. Elle s'appuie sur les deux premières dimensions du patois rôliste mais n'est vraiment compréhensible que grâce à la troisième dimension, à savoir la dimension référentielle. Afin de comprendre la signification de cette plaisanterie nous l'analyserons en fonction des trois dimensions.

La dimension technique
Elle intervient ici au travers du terme " backstaber". Le terme " backstab" désigne une capacité spéciale que possède les voleurs dans le jeu de rôle AD&D. Cette capacité leur permet de s'approcher discrètement d'une cible dans le but de l'assommer ou de la poignarder. On notera que le terme anglais (backstab) a été francisé pour en faire un verbe. La dimension culturelle : elle apparaît au travers du terme " beholder". Un beholder est une créature fantastique que l'on retrouve dans de nombreux univers médiévaux fantastiques. Cette créature ressemble à une boule de chair de un mètre de diamètre environ, flottant au dessus du sol. Elle possède un énorme oil central ainsi que de multiples petites tentacules au bout desquelles sont situés de petits yeux. Le beholder a donc une vision panoramique. A la lumière de ces traductions on comprend pourquoi il est comique de penser réussir à poignarder (backstaber) un beholder puisque il n'est pas possible de s'approcher de cette créature sans qu'elle ne s'en aperçoive. Cette plaisanterie fait partie d'un univers référentiel du fait que les termes utilisés ici se sont, avec le temps, émancipés de leur caractère technique (le terme backstab est devenu une expression courante pour signifier que l'on souhaite supprimer un adversaire gênant) ou culturel (on conseillera aux personnages paranoïaques, qui vérifient sans cesse s'il n'y a personne dans leur dos, de se faire greffer des yeux de beholder). Ces termes font désormais partie d'un vocabulaire commun à tous les rôlistes.

L'univers de référence commun au groupe ne s'est pas simplement formé en généralisant des termes à caractère technique ou culturel. En effet le patois rôliste fait également souvent référence à des films, des bandes dessinées, des séries télévisées, des romans etc. La connaissance de cette " culture de l'imaginaire" permet de saisir tous les sous entendus qui parsèment les discussions des rôlistes. Ainsi la lecture de certaines ouvres (ex : Le seigneur des anneaux de J.R.R. Tolkien) ou la vision de certains films (ex : La Guerre des Etoiles de George Lucas) font également partie de l'apprentissage du rôliste. Les références à ces " classiques" sont incessantes durant les parties de jeux de rôles. Si les joueurs de jeux de rôles affectionnent particulièrement cette " culture de l'imaginaire" c'est parce que c'est en son sein qu'ils trouvent leurs sources d'inspiration. Voir un film de science-fiction ou lire un roman policier permet au joueur de jeux de rôles de trouver des idées qui lui permettront, soit de créer un scénario si il est meneur de jeu, soit d'incarner un personnage intéressant si il est joueur. On voit ici que les rôlistes ont une perception du monde différente. Toutes situations peut être source d'inspiration pour un rôliste et c'est cette perception du monde qui différencie les rôlistes des non rôlistes. Un joueur de jeux de rôles approchera les ouvres littéraires ou cinématographiques en cherchant à y relever les idées intéressantes de façon à les réutiliser durant de futures parties de jeux de rôles. Il apparaît donc que devenir rôliste implique une socialisation par étapes (acquisition des différentes dimensions du langage puis adhésion à un univers de référence commun). On peut ainsi parler d'une carrière du rôliste en tant qu'un apprentissage et une évolution chronologique (voir Becker, Outsiders).

Conclusion

Au vue de cette approche sociolinguistique on se rend compte que l' intégration dans le groupe social des joueurs de jeux de rôles implique un processus de socialisation. L'acquisition du patois rôliste se fait par étapes successives et le niveau d'intégration d'un individu dans ce groupe peut être mesuré, entre autre, à la maîtrise de ce patois. Si cette intégration se fait par étapes c'est qu'il existe une hiérarchie dans ce groupe social, cette hiérarchie implique que l'identité culturelle du rôliste relève d'une construction sociale, ainsi on pourra chercher à définir les différentes étapes de cette construction et à mettre à jour une carrière du rôliste (Voir Becker, Outsiders). Il me semble que ce sujet d'étude mériterait de plus amples investigations dans la mesure où, en l'étudiant sous un seul angle il n'est pas possible de saisir ce sujet dans sa globalité. Une approche pluri-méthodique me paraît la mieux adaptée. Dans cette optique une approche qualitative permettrait de répondre à la question suivante : comment devient-on joueur de jeux de rôles ? Elle permettrait de voir dans quelle mesure l'adhésion à un univers de référence basé sur les grandes ouvres du fantastique prédispose les individus à devenir rôliste. Tandis qu'une approche quantitative, permettrait de construire le portrait type du rôliste. Il serait également possible de concilier ces deux approches dans un même projet visant à démontrer si les rôlistes constituent effectivement un groupe culturel à part.
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Enfin du serieux ^^
■ Benouaste 21/01/2011
Merci Fred pour cet article tres serieux et manifestement tres bien documente (ne manque plus qu'une biblio pour en faire une "these").

Les explications sur les valeurs actantielles des PJ et du MJ meriteraient d'etre approfondies car il y aurait beaucoup a en dire aussi d'un point de vue purement semiotique. Je pense que ce genre de considerations, certes pedantes de prime abord, ne peuvent qu'aider les MJ presents ou a venir, a comprendre comment se forme un recit et comment on batit un scenario.

En tout cas, un article que je recommande chaudement a tous les (futurs) rolistes.
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Merci à Monsieur Sandy Petersen !
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