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Melanie, une jeune californienne, se rend à la petite ville côtière de Bodega Bay afin d'y séduire un avocat célibataire qu'elle a rencontré à San Francisco. Elle y fait connaissance avec la famille et les amis de cet homme. Mais, pendant ce temps là, les oiseaux de la région se mettent à se comporter de façon de plus en plus agressive envers les hommes...



Psychose (1960), que Hitchcock avait réalisé et produit lui-même avec un budget très modeste, s'est révélé être un énorme succès mondial. Hitchcock décide ensuite de se consacrer à Les oiseaux, inspiré par une nouvelle de Daphné Du Maurier (Rebecca (1940) de Hitchcock était déjà l'adaptation d'un de ses romans) et par des faits divers réels au cours desquels des oiseaux malades ont attaqué des hommes. La préparation sera très longue pour l'époque (le film ne sera tourné qu'en 1962), car Dave Fleischer et Larry Hampton ont du élaborer de nombreux trucages inédits afin de rendre crédibles les scènes d'agressions. De même, il fallut trouver et dresser des centaines d'oiseaux : ce sera Ray Berwick (dresseur pour la série TV Lassie, le film Jonathan Livingston le goéland (1973)...) qui se chargera de cette besogne titanesque. Dans le rôle principal, on trouve Tippi Hedren, qui était auparavant mannequin : elle tourna encore avec Hitchcock dans Pas de printemps pour Marnie (1964) aux côtés de Sean Connery ; puis on la verra dans La comtesse de Honk Kong (1967), la dernière réalisation de Charles Chaplin (Les temps modernes (1936)...); ensuite, sa carrière va péricliter et se limiter à des petites productions ou à des oeuvres pour la télévision. A ses côtés, on trouve la vedette hollywoodienne Rod Taylor (La machine à explorer le temps (1960) de George Pal, Zabriskie point (1970) de Michelangelo Antonioni...).
Les oiseaux s'inscrit, d'une certaine manière, dans la tradition de certaines oeuvres de science-fiction des années 1950, dans lesquelles des animaux, devenus monstrueux après avoir été soumis à des radiations, s'en prennent à l'homme :Tarantula (1955) de Jack Arnold, et surtout Les monstres attaquent la ville (1954) de Gordon Douglas, dans lequel une cité est envahie par des fourmis géantes. Pourtant, ici, Hitchcock préfère laisser inexpliquées les raisons de l'agressivité des oiseaux envers les hommes. De même, il n'emploie que des animaux banals et a priori inoffensifs (moineaux, mouettes, corbeaux...) pour rendre encore plus insolites et effrayantes leurs attaques. Tout ce mystère terrifiant et cette gratuité irrationnelle entourant la révolte des oiseaux fait peser sur ce film une atmosphère tragique de fin du monde, au cours de laquelle la civilisation semble s'effondrer en peu de temps : cela, ainsi que la fin ambiguë, fait beaucoup penser à des oeuvres de science-fiction pessimistes comme L'invasion des profanateurs de sépultures (1956) de Don Siegel, ou à des films d'horreur montrant l'invasion horrible et inexorable des Etats-Unis, comme La nuit des morts-vivants (1968) de George Romero ou L'enfer des zombies (1979) de Lucio Fulci. Mais Les oiseaux annonce surtout les très nombreux films catastrophes des années 1970 dans lesquels les humains doivent affronter des animaux particulièrement agressifs, que ce soit des requins (Les dents de la mer (1975) de Steven Spielberg...), des crapauds (Crapauds (1972) de George McCowan...), des baleines (Orca (1977) de Michael Anderson...), des ours (Grizzly (1976) de William Girdler...), des lapins (Night of the lepus (1972) de William F. Paxton)... et j'en passe !

Pour Les oiseaux, Hitchcock et ses collaborateurs ont du mettre au point des techniques nouvelles afin de rendre de manière réaliste les attaques des oiseaux : de nombreuses superpositions de pellicules ont été utlisées pour donner l'impression qu'une nuée d'oiseaux s'abat sur les victimes et les déchiquète à coup de bec. Pour certaines séquences, on a utilisé des animaux mécaniques ou des oiseaux dressés. Le plus éprouvant fut le tournage de l'agression de Mélanie dans le grenier, pour laquelle on enferma Tippi Hedren dans une cage remplie de vrais mouettes agressivess qui l'ont réellement blessée, si bien que le tournage dut être interrompu. On note que les blessures sont, pour la première fois dans un film de Hitchcock, très sanglantes, voire gore : ainsi les cadavres dévorés par les oiseaux sont parcourus de blessures saignantes. On retrouve même un personnage aux orbites vides, les deux yeux arrachés : cette idée a été inspiré à Hitchcock par un véritable fait divers, au cours duquel des oiseaux ont attaqué des moutons en s'en prenant à leurs yeux. Cette surenchère dans la violence graphique a sans doute aussi été influencée par l'arrivée d'oeuvres horrifiques de plus en plus violentes, que ce soit en provenance d'Angleterre (Frankenstein s'est échappé ! (1957) de Terence Fisher, et les autres œuvres de la Hammer...) ou d'Italie (Le masque du démon (1960) de Mario Bava...).

A ce titre, Les oiseaux est en effet un film particulièrement cruel. Non seulement, les attaques sont sanglantes, mais les plus spectaculaires ont la particularité de s'abattre sur des victimes très vulnérables. Ainsi les oiseaux s'en prennent deux fois à des groupes d'enfants, notamment lors la séquence fameuse et longue de la sortie de l'école. De même, l'attaque de Melanie dans le grenier est une séquence dure, implacable et destructrice, durant laquelle aucun coup de coup bec ne nous est épargné. On remarque aussi d'autres scènes très pesante, comme celle où un homme périt en faisant tomber accidentellement une allumette dans une flaque d'essence. Tout cela participe à l'atmosphère froide et cruel de ce film, encore soulignée par les décors mornes et tristes de Bodega Bay (le décorateur avouait s'être inspiré, à la demande d'Hitchcock, du fameux tableau Le cri du peintre expressionniste Münch pour l'ambiance de cette ville).

La froideur rigoureuse de Les oiseaux est encore appuyée par sa bande-son extrêmement originale. Du générique à la dernière image, le film ne comprend pour ainsi dire aucune musique. Le compositeur Bernard Hermann (Psychose...) a seulement participé à l'élaboration des bruits accompagnant les oiseaux : réalisées à partir d'instruments électroniques (rares à l'époque, bien qu'il y a ait eu des précédents, comme pour le classique du cinéma de science-fiction La planète interdite (1956) de Fred M. Wilcox ), ces boucles sonores répétitives et angoissantes sont particulièrement oppressantes, notamment pendant les agressions. Généralement, dans ce genre de scènes, les réalisateurs mettent en avant les cris des victimes et une musique dramatique. Hitchcock prend ici le contre-pied de cette solution banale. Les personnes attaquées, frappées de stupeur ne parviennent pas à hurler et, comme on l'a déjà vu, il n'y a pas de musique dans ce film : si bien que les seuls bruits qu'on entend durant ces passages terribles sont le froissement chaotique et incessant des ailes des oiseaux, ainsi que leurs cris animaux et étouffés.

D'autre part, la froideur et la dureté de Les oiseaux se trouvent aussi dans le regard dur que porte le récit sur les personnages, notamment dans la première moitié du métrage, durant laquelle les scènes avec les oiseaux sont assez rares. On a alors le portrait moraliste et assez misogyne de trois femmes. Mélanie, petite fille riche et capricieuse, est une croqueuse d'homme superficielle, hypocrite et menteuse. Annie, l'institutrice, est une romantique névrosée qui se complait de manière masochiste dans une passion sans espoir. Enfin, Lidya Brenner, la mère de Mitch, est une femme possessive, castratrice et fragile. Cette présentation sans indulgence des personnages féminins est encore durcie par une lecture psychanalytique des rapports entre les membres de la famille Brenner, avec une insistance particulière sur la notion de l'absence du père. Ce recours insistant à la psychanalyse pour dépeindre les personnages névrosés est en effet une constante du travail de Hitchcock depuis ses thrillers des années 1940 (La maison du docteur Edwards (1945), Les enchaînés (1946)...).

Les oiseaux est donc un film dur, froid et cruel, qui n'est pas véritablement "aimable". Si on peut lui reprocher de petites longueurs par moment, et une lecture psychanalytique parfois un peu trop appuyée, on ne peut pas nier qu'il s'agit d'une oeuvre secrétant avec génie une inquiétude particulièrement éprouvante.

Après ce film, Hitchcock ne retournera plus dans le domaine de l'horreur. En 1964, il réalisera Pas de printemps pour Marnie, un thriller psychologique dans lequel Sean Connery interprète le mari d'une cambrioleuse sans scrupule interprétée par Tippi Hedren. Puis il se tournera vers le cinéma d'espionnage, genre dans lequel il avait connu quelques gros succès (Les trente neuf marches (1935), La mort aux trousses (1959)...) avec Le rideau déchiré (1966) et L'étau (1969). Dans Frenzy (1972), il racontera la recherché d'un serial killer dans Londres, puis conclura sa carrière avec Complot de famille (1976), une comédie à suspens assez anecdotique. Alfred Hitchcock mourra le 26 avril 1980.

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Exceptionnel
■ Babymad 16/10/2006
Voilà enfin un film à suspense digne de ce nom,avec toute l'ingeniosité d'Hitchcock au service de l'émotion!
Un grand moment!
L'unique
■ Docteur Clarendon 16/08/2003
Le seul film du "maître" que j'aime.... mais celui là je dois dire qu'il s'agit d'un chef d'oeuvre. Les oiseaux et l'ambiance du film est vraiment terrifiante... Les attaques des volatiles sont époustouflantes et il faut se remémorer l'époque du tournage de ce film pour bien ce rendre compte de la prouesse technique mais aussi du courage à ce lancer dans un film complètement décalé pour son époque. Beaucoup de choses peuvent être utilisés dans un bon scénar. Je pense que c'est réellement un grand classique à ne manquer sous aucun prétexte.
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